08Déc

Conseiller en recrutement, consultant, démarcheur… nombreux sont les termes pour désigner un « chasseur de tête ». Bien que la majorité d’entre eux préfèrent l’appellation « recruteur par approche directe » c’est pourtant bien de cela dont il s’agit: le chasseur de tête recherche du personnel dont la qualification et l’expérience seront les mieux adaptées pour exceller à un poste dans telle ou telle entreprise. Un objectif qui demande à la fois discrétion et intuition. « Un chasseur de tête sait déceler un talent suivant la mission de l’entreprise. Il est capable d’aller à la chasse aux informations de personnes qui n’ont pas forcément laissé de traces même sur Internet », explique Pascal Kroll, co-auteur du Guide des professionnels de recrutement.

Mais la crise a bousculé leur méthode de travail et poussé les entreprises à revoir leur stratégie. Comme les groupes qui les mandatent, les cabinets de recrutement ont aussi traversé des années de vache maigre. Entre 2008 et 2009, la profession a subi une perte de chiffre d’affaires de 30%. De plus, malgré un chômage record, les chasseurs de tête ont peiné à trouver les profils adaptés. Un problème qui, selon le consultant indépendant en recrutement François Jeandet, est lié à la difficulté de faire partir des candidats en poste de leur entreprise. « Aujourd’hui les cadres ne sont plus mobiles. Il est devenu très difficile de les convaincre de changer de région. On fait donc beaucoup plus attention aux critères géographique » explique-t-il. « Beaucoup de chasseurs de tête rencontrent des candidats qui ne donnent pas suites. Ils préfèrent rester au chaud. Maintenant, un consultant doit être sûr que le candidat ne changera pas d’avis », ajoute Eric Beaudouin directeur général d’Oasys consultant.

Place aux conseils et au web

Tirant les leçons de la crise, les cabinets ont dû revoir leurs stratégies. La majorité d’entre eux ont investi dans des services d’évaluation, de coaching ou de conseils en ressources humaines, prestations très sollicitées par les entreprises. « Pour compenser le manque de missions, les cabinets n’ont eu d’autres choix que de se diversifier », analyse Eric Beaudouin. En 2011, seuls 26% des cabinets préfèrent se consacrer uniquement au recrutement pour ne pas « brouiller leur image ». Si le démarchage rapporte plus d’argent aux cabinets, cette nouvelle palette d’activité représente moins de 50 % de leur activité. « Beaucoup de cabinet essaient de rebondir en identifiant les secteurs qui marchent. C’est une question d’opportunité », ajoute Pascal Kroll.

Côté « abordage » si le contact direct avec la personne reste la principale tactique d’approche, l’utilisation des réseaux sociaux personnels ou professionnels est devenue incontournable pour les recruteurs à la recherche du candidat adéquat: LinkedIn ou Viadeo, en très nette progression depuis 2010, remplacent désormais les traditionnels annuaires des anciens élèves ou répertoires d’entreprise. « Les réseaux sociaux sont devenus une méthode indispensable pour les chasseurs de tête. Ils les habilitent à contacter rapidement et directement les candidats » soutient François Jeandet. Ces outils restent cependant à 80% utilisés pour l’information et l’affinage des profils. La numérisation totale des cabinets a permis aux recruteurs de traiter plus rapidement les candidatures spontanées (de 31% en 2006 à 72% en 2010). Elle aide également les jeunes universitaires à se faire une place face aux jeunes diplômés qui offraient plus de traçabilité aux chasseurs de tête grâce à leurs expériences.

Recherche bac + 4 désespérément

Si la crise a modifié les méthodes, les profils recherchés sont similaires. Les diplômés des grandes écoles (commerce, ingénieur) restent très recherchés. « Les entreprises privilégient le clonage c’est-à-dire remplacer un salarié par une personne ayant les mêmes qualifications et le même niveau d’étude, c’est le serpent qui se mord la queue », explique Gwenole Guiomard, rédacteur en chef du site emploi-pro. Face à un marché du travail de plus en plus demandeur de bacs +4 ou +5, les cadres mobiles constituent donc une cible privilégiée. Du côté des employeurs, les embauches ne se feront pas attendre: une dizaine de secteurs dont l’aéronautique, la banque, l’assurance, l’informatique et la grande distribution ont prévu de recruter d’ici la fin de l’année. « 2011 est l’année du redémarrage de l’embauche en masse des cadres et 2014 marquera le point d’orgue de ces recrutements », informe Gwenole Guiomard. Aucun doute, les chasseurs de tête ont de beaux jours devant eux.

Article paru sur L’express.fr